De Moonbeam à vedette, Fabien Lavoie met fin à une carrière légendaire de rugby en fauteuil roulant

Comité paralympique canadien

02 février, 2024

Une opération à cœur ouvert décide du sort du quintuple paralympien

Lavoie

Un guerrier sur le terrain de rugby en fauteuil roulant, Fabien Lavoie s’émeut contre toute attente lorsque l’on parle de son enfance. Il y a des souvenirs difficiles, couronnés par un accident qui l’oblige à se déplacer en fauteuil roulant.

Lavoie, qui a annoncé en décembre sa retraite après plus de 20 ans comme l’un des meilleurs joueurs de l’équipe nationale, est né à Moonbeam (Ontario), une petite communauté franco-ontarienne située le long de la route 11, entre North Bay et Kapuskasing.

Sa famille est partie pour Québec quand il avait six ans, mais elle est souvent revenue à Moonbeam pour diverses célébrations familiales. On connaît Moonbeam pour sa soucoupe volante en bord de route, une référence humoristique aux pionniers qui auraient été témoins de lumières clignotantes tombant du ciel.

« J’ai encore beaucoup de famille là-bas », indique Lavoie. « Nous passions nos Noëls et nos vacances d’été à Moonbeam. Beaucoup de bons souvenirs du nord de l’Ontario. »

Lavoie est particulièrement émotionnel lorsque l’on parle de son grand-père Stanislav Lavoie qui a été maire de Moonbeam de 1959 à 1972 et a supervisé l’installation du premier système d’égouts de la ville, achevé en 1965.

« Mon grand-père était un leader », raconte Lavoie, âgé de 42 ans. « C’était un exemple pour tout le monde. Il est décédé il y a de nombreuses années, mais chaque fois que je pense à lui, ça me rappelle beaucoup de choses. »

Comme ses adversaires l’ont constaté sur le terrain de rugby en fauteuil roulant, Lavoie est un client difficile. Il dit qu’il a été « décrocheur » pendant son adolescence. Il a un peu joué au baseball, et ses parents n’avaient pas les moyens de l’inscrire au hockey.

« J’étais très en colère quand j’étais jeune et je n’avais pas de stabilité », se souvient-il.

À 17 ans (en 1998), on le renvoie de l’école secondaire et il commence à travailler à Sept-Îles pendant l’été. C’est là qu’un tracteur lui est tombé dessus, « pulvérisant » ainsi sa vertèbre cervicale C7.

Lavoie s’est retrouvé dans un centre de rééducation de Québec (Institut de réadaptation en déficience physique de Québec), où il rencontre Benoit Labrecque, l’entraîneur de l’équipe de Québec de l’époque.

« Il m’a dit que j’avais un grand potentiel et comme j’ai toujours été un enfant rapide et athlétique et que j’aimais les sports de contact, j’ai rapidement attrapé la fièvre du rugby. Le rugby en fauteuil roulant et les gens qui l’entourent ont été ce qui pouvait m’arriver de mieux après ma blessure. »

« J’ai toujours voulu être un athlète. Je ne sais pas combien de fois j’ai demandé à mon père de jouer au hockey. »

Il s’en est suivi une incroyable carrière d’athlète de haute performance. Lavoie a ensuite participé à cinq Jeux paralympiques (2004-2020) et a remporté deux médailles d’argent et une de bronze lors de ses trois premières participations. Il a également remporté des médailles aux Championnats du monde de 2006 et de 2014. Autre fait marquant, il a gagné la médaille d’or aux Jeux parapanaméricains de 2015.

En outre, il a joué de nombreuses années dans des ligues américaines et logeait dans la famille de ses coéquipiers ou partageait des appartements avec des coéquipiers célibataires. Il s’est notamment arrêté à Seattle, Houston, Chicago et Philadelphie. Ces années l’ont aidé à développer de nouvelles compétences sur le terrain, ce qui a fait de lui l’un des joueurs les plus polyvalents de ce sport. En dehors du terrain, son anglais s’est également beaucoup amélioré.

« Parfois, j’avais ma propre chambre, d’autres fois je devais me contenter du sofa », explique-t-il. « Ça n’avait pas d’importance pour moi; ce qui comptait, c’était l’expérience. J’étais jeune et célibataire. Avec ces ligues, la saison de rugby en fauteuil roulant ne s’arrêtait jamais. »

Lavoie a aussi vécu à Vancouver et c’est là qu’il a rencontré sa compagne. Elle avait déjà deux enfants d’une relation précédente et, ensemble, ils en ont eu deux autres. Ils sont actuellement âgés de 1, 3, 9 et 10 ans.

L’année dernière, Lavoie devait subir une opération au dos quand les médecins ont découvert un problème cardiaque pendant un examen. Il a subi une opération à cœur ouvert au cours de l’été, qui était nécessaire pour faire suite à l’opération au dos de novembre.

Il est toujours en cours de rétablissement, mais il a entamé un nouveau chapitre de son incroyable vie. Il prévoit de rester impliqué dans le rugby en fauteuil roulant, mais pour l’instant, sa jeune famille est sa priorité absolue. Il a aussi récemment commencé un nouvel emploi.

« Dans ma tête, j’allais à Paris (Jeux de 2024), mais je n’ai pas l’autorisation de jouer, alors j’ai dû prendre une décision pour aider à subvenir aux besoins de ma famille », dit Lavoie. « Je n’avais pas le choix. »

Patrick Côté, entraîneur en chef de l’équipe canadienne de rugby en fauteuil roulant, dit que l’équipe a « perdu un guerrier ».

« Fab apportait toujours de la combativité et de l’énergie avec lui », affirme Côté. « Nous savions ce que nous allions obtenir. Cela permettrait à l’équipe de s’élever. Mais par-dessus tout, j’ai toujours apprécié son authenticité. »

« Cette qualité lui servira certainement pour la suite des choses. »

« T’es capable, Fab! »