Dix ans plus tard : Les retombées durables de Toronto 2015 sur le sport paralympique canadien
Plusieurs athlètes vedettes aux Jeux de Paris 2024 ont fait leurs débuts aux Jeux il y a dix ans
OTTAWA – Il y a maintenant 10 ans, Alison Levine, joueuse de boccia canadienne, et Priscilla Gagné, parajudoka, représentaient pour la première fois le Canada à des Jeux majeurs : aux Jeux parapanaméricains de Toronto.
Depuis, chacune d’entre elles a participé à trois Jeux paralympiques, s’est classée première au monde et a remporté des médailles aux Championnats du monde. De plus, l’attention médiatique suscitée par les Jeux à domicile les a incitées à militer en faveur du parasport et des personnes en situation de handicap.
Levine et Gagné ne sont que deux exemples parmi la pléiade canadienne qui, après avoir participé à ces Jeux, a connu une carrière internationale dont on parle encore aujourd’hui.
En fait, l’Équipe paralympique canadienne de 2024, composée de 126 membres, en comptait 39 qui avaient participé aux Jeux de Toronto. Une décennie, ça peut sembler court dans de nombreux domaines, mais en sport, une aussi longue carrière représente une réalisation exceptionnelle.
« Je n’arrive pas à croire que ces Jeux se sont déroulés il y a déjà dix ans », a admis Levine la semaine dernière au CPC. « J’ai l’impression que ça fait plusieurs décennies, mais en même temps, c’est comme si c’était hier. Je n’ai que de merveilleux souvenirs de ces Jeux. »
Les Jeux de 2015 ont eu lieu à domicile et ce dont se rappelle Gagné, qui a une déficience visuelle, c’est autant la présence de sa famille et de ses proches que sa médaille d’argent dans la catégorie féminine des 52 kilos. Elle a ensuite été porte-drapeau du Canada aux Jeux paralympiques de Tokyo 2020, à l’issue desquels elle a remporté la médaille d’argent.
« C’était la seule compétition à laquelle mon frère et sa famille ont pu assister », raconte Gagné au CPC à propos de Toronto 2015. « Je n’arrive pas à croire que ça fait déjà 10 ans. La présence de mes parents, de mon frère et de ma belle-sœur avec leurs enfants, en plus de la visite surprise de mon entraîneur de lutte du secondaire, ça m’a beaucoup émue. J’étais très touchée. Il a fait le trajet depuis Brantford pour venir nous voir concourir. »
Les cinquièmes Jeux parapanaméricains, qui ont eu lieu du 7 au 15 août 2015, ont été la dernière occasion pour l’élite des para-athlètes du Canada de participer à des Jeux à domicile.
On y a accueilli 1 615 athlètes qui représentaient 28 pays et qui ont participé à 445 épreuves dans 15 sports. David Johnston, gouverneur général du Canada, a officiellement déclaré l’ouverture Jeux, et Chantal Petitclerc, légende de la course en fauteuil roulant, y a allumé la vasque.
La cérémonie d’ouverture s’est déroulée à guichets fermés au stade York Lions Stadium, puis l’exceptionnelle cérémonie de clôture a eu lieu au Nathan Phillips Square, au centre-ville de Toronto.
Le Canada accueillait les Jeux parapanaméricains pour la première fois, tandis que Toronto organisait pour la deuxième fois des Jeux majeurs en parasport. En 1976, Toronto a accueilli ce que l’on a appelé à l’époque la Torontolympiade, des olympiades pour les personnes en situation de handicap, que l’on appelle officiellement aujourd’hui « Jeux paralympiques ».
L’équipe canadienne a réalisé une performance remarquable à Toronto : elle y a remporté 168 médailles (50 médailles d’or, 63 d’argent et 55 de bronze) et s’est classée deuxième derrière les États-Unis. Le Brésil a terminé en tête du classement des médailles.
Aurélie Rivard, vedette canadienne de paranatation qui n’en était qu’à sa deuxième participation à des Jeux majeurs et qui n’avait que 19 ans, a été l’athlète canadienne à avoir remporté le plus de médailles avec un total de cinq (quatre d’or et une d’argent), tandis que sa coéquipière Katarina Roxon en a remporté quatre.
Alec Elliot, Nicolas-Guy Turbide, Sabrina Duchesne, Tess Routliffe et Abi Tripp comptent également parmi les membres de l’équipe de natation qui a participé aux Jeux de Toronto ainsi qu’aux Jeux de Paris de l’année dernière.
Deux membres de l’équipe de 2015 ont participé aux Jeux de Paris à une discipline sportive différente de celle des Jeux de Toronto. Nathan Clement a remporté la médaille de bronze au 50 m papillon à Toronto puis, en 2024, il a décroché la médaille d’argent en paracyclisme aux Jeux paralympiques.
Yuka Chokyu a concouru en tennis en fauteuil roulant en 2015, puis en parabadminton aux Jeux de 2024.
Cinq membres de l’équipe féminine de volleyball assis qui a remporté l’été dernier une médaille de bronze historique à Paris ont participé aux deux Jeux : Felicia Voss-Shafiq, Anne Fergusson, Heidi Peters, Jolan Wong et Katelyn Wright avaient en effet aidé le Canada à obtenir la médaille de bronze à Toronto.
Zak Madell, 21 ans, a mené l’équipe canadienne de rugby en fauteuil roulant jusqu’à la médaille d’or à Toronto 2015, ce qui a permis à l’équipe de se qualifier pour les Jeux de Rio. Il est parmi les sept membres qui, neuf ans plus tard, ont également concouru aux Jeux de Paris, en compagnie de Cody Caldwell, Patrice Dagenais, Byron Green, Trevor Hirschfield, Travis Murao et Mike Whitehead.
« Nous n’avons jamais eu un public aussi nombreux, ni avant ni après », déclare Madell dans un balado avec Para Sport Nation (en anglais). « C’est un souvenir très important que je chérirai toujours. »
Madell a été nommé porte-drapeau de la cérémonie de clôture des Jeux de Toronto 2015.
Les équipes masculine et féminine de basketball en fauteuil roulant ont également remporté un franc succès à Toronto 2015. Elles ont toutes deux remporté la médaille d’argent à Toronto et se sont classées quatrièmes à Paris 2024.
Ces équipes comptaient au total 10 membres qui avaient également participé aux Jeux de Toronto. Chez les hommes : Nik Goncin, Bo Hedges, Vincent Dallaire, Chad Jassman, Jonathan Vermette et Tyler Miller. Chez les femmes : Rosalie Lalonde, Arinn Young, Cindy Ouellet et Melanie Hawtin.
Parmi les autres athlètes de Toronto 2015 qui ont participé aux Jeux de Paris, on compte Brent Lakatos, Guillaume Ouellet et Renee Foessel en para-athlétisme, Charles Moreau et Mike Sametz en paracyclisme ainsi que Whitney Bogart en goalball féminin.
Levine a remporté la médaille d’argent en boccia (paires) BC4 avec Marco Dispaltro et Caroline Vietnieks. Il s’agissait seulement de sa deuxième année au sein de l’équipe nationale.
« À Toronto, je me suis sentie pour la première fois comme une véritable athlète et j’ai cru en mon potentiel en boccia », admet-elle. « Je faisais partie d’Équipe Canada. Mon entrée dans le stade derrière Marco, notre porte-drapeau, et en compagnie de mon chien d’assistance, est un merveilleux souvenir qui, même après plus de dix ans, ne s’est pas le moindrement estompé. »
Les Jeux de Toronto ont laissé un héritage incroyable, dont le plus important est le Centre des sports panaméricains de Toronto, qui abrite également l’Institut canadien du sport de l’Ontario, une installation sportive polyvalente. Le centre accueille encore aujourd’hui des compétitions majeures, en plus de servir de centre d’entraînement à plusieurs athlètes paralympiques.
Il sert également de quartier général à l’Académie nationale de basketball en fauteuil roulant, où s’entraîne Tamara Steeves, quadruple paralympienne.
« Cela signifie beaucoup pour nous de profiter de cette installation », confie Steeves au Comité olympique canadien. « Nous nous entraînons ici tous les jours. Ce n’est pas seulement un superbe terrain de basketball. Il y a une salle d’entraînement, un tapis roulant pour travailler sur notre conditionnement physique et tout ce dont nous avons besoin pour être au sommet de notre forme. »
Plusieurs centaines de personnes profitent chaque jour de ces installations, qui comptent également une piscine olympique et qui permettent aux para-athlètes de montrer leurs talents.
« C’est magnifique de pouvoir faire connaître notre sport aux personnes qui ne sont pas en situation de handicap », ajoute Steeves. « Les gens qui marchent autour sur la piste nous voient jouer au basketball en fauteuil roulant et nous disent que nous sommes tellement incroyables. »
Levine aimerait parfois pouvoir immortaliser ce sentiment particulier qu’elle a éprouvé il y a dix ans à Toronto.
« Avec le recul, il me semble que la vie était plus simple à l’époque, qu’il n’y avait pas de grandes attentes et qu’on ne pensait qu’au plaisir du sport », se souvient-elle. « Quand je repense à ce que j’ai ressenti à Toronto 2015, je réalise que c’est de cela dont je dois me souvenir et ce à quoi je dois penser chaque fois que j’entre sur le terrain. »
« Se souvenir et ressentir la joie. »
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